HOMELIE SUR CETTE PAROLE DE L EVANGILE
SELON S. LUC : "JE DETRUIRAI MES GRENIERS ET J'EN CONSTRUIRAI DE PLUS GRANDS"
Lu.12:18 ET SUR L'AVARICE
VII. - "A qui fais-je tort, - dit
l'avare - en gardant ce qui m'appartient?" Qu'y a-t-il, dis-moi, qui t'appartienne?
Où as-tu pris quelque chose pour l'introduire dans ta vie?
Comme quelqu'un qui, après
avoir occupé une place au théâtre, repousserait ceux
qui voudraient entrer, parce qu'il considère comme sa propriété
personnelle ce qui est mis à la disposition de tous indistinctement:
tels sont les riches. Ils s'emparent d'avance de ce qui est à tous
et se l'approprient en vertu du droit du premier occupant.
Si chacun prenait seulement de quoi
subvenir à ses besoins et laissait le superflu à l'indigent,
personne ne serait riche, personne ne serait pauvre, personne ne serait
dans la misère.
N'es-tu pas sorti nu du sein de
ta mère? Ne t'en retourneras-tu pas nu encore dans la terre? Les
biens présents, d'où te sont-ils venus? Si tu dis que c'est
du hasard, tu es un impie, car tu ignores le Créateur et tu n'as
pas de reconnaissance pour Celui qui t'a pourvu. Si tu admets que c'est
de Dieu, dis-nous la raison pour laquelle tu les as reçus.
Dieu serait-il injuste, lui qui
nous distribue inégalement les choses nécessaires à
la vie? Pourquoi es-tu riche, toi, alors que celui-là est pauvre?
N'est-ce pas seulement pour que toi, tu reçoives la récompense
de ta honte et de ta fidèle administration, et que lui soit honoré
des prix magnifiques réservés à la patience?
Mais toi, qui fais tout disparaître
dans les insatiables replis de ton avarice, crois-tu ne faire tort à
personne, lorsque tu dépouilles tant de gens?
Qui est l'avare? Celui qui ne se
contente pas du nécessaire.
Qui est le spoliateur? Celui qui
prive chacun de ses biens.
Et toi, n'es-tu pas avare, n'es-tu
pas spoliateur, quand tu t'appropries les biens que tu as reçus
en intendance? Celui qui dépouille un homme de ses vêtements
sera appelé voleur, et celui qui ne couvre pas l'homme qui est nu,
alors qu'il peut le faire, est digne d'un autre nom? Il appartient à
celui qui a faim, le pain que tu gardes; à celui qui est nu, le
manteau que tu conserves dans tes coffres; à celui qui est sans
chaussures, la chaussure qui pourrit chez toi; au pauvre, l'argent que
tu tiens enfoui. Ainsi, tu commets autant d'injustices qu'il y a de personnes
à qui tu pourrais donner.
- Basile le Grand
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