Une soeur a fait la réflexion
suivante que j'ai trouvé intéressante :
«Etrangement les discussions
qu'on a parfois entre chrétiens finissent par
des disputes (quand on est pas
du même avis) ce qui arrive (pour moi) très
rarement avec des personnes non
chrétiennes...et c'est là où je commence à
me poser des questions....»
Assez paradoxal en effet, pourquoi
?
Voici mon idée là-dessus,
j'aimerais lire les vôtres aussi, peut-être, quand
ça se produit, avons-nous
alors des attentes trop élevées? On s'attend à ce
que les non-chrétiens n'acceptent
pas nos opinions, après tout, ils n'ont
pas le Saint-Esprit mais serait-on
contrarié de voir des chrétiens ne pas
penser comme nous?
Je me suis rendu compte que les
fois où je suis devenu frustré en me bornant
à un frère qui ne
voulait pas se rallier à ma pensée c'est que je
m'imaginais qu'il changerait d'idée
après avoir lu mon opinion... Ça fait
maintenant un bon bout de temps
que je ne suis plus frustré à jaser
doctrines sur les listes de discussion
! :-)) Plutôt je trouve ça
enrichissant et ça m'amène
parfois à jeter un regard nouveau ou plus
approfondi sur le thème
abordé. Je n'ai pas de contrôle sur la réaction des
autres, s'ils se frustrent et me
lancent des paroles désobligeantes parce
que je ne me rallie pas à
leurs opinions, je ne peux rien y faire, c'est à
eux d'examiner leurs attentes lors
de débats.
- Yvan Rheault
Il y a sans doute plusieurs facteurs
pour expliquer ce phénomène
tristement courant.
Toutefois, ce n'est pas une spécificité
chrétienne, je crois que les
disputes entre gens proches sont
beaucoup plus fréquentes qu'entre gens
lointains (on les ignore souvent),
notamment en politique mais aussi dans
n'importe quelle passion (Quoi
? ta carte graphique est une XYZ ! ?).
Sans doute, ne peut-on être
trahi que par les siens, sans doute est-il
difficile d'être prophète
en son pays.
Yvan a raison d'insister sur la
différence d'attente, je voudrais en
souligner un aspect particulier.
Il me semble que le désaccord
entre gens proches est beaucoup plus
douloureux car il y a une véritable
remise en cause intellectuelle.
En effet si je rencontre quelqu'un
avec qui je partage la même opinion sur
le sujet A, sur le sujet B, sur
le sujet C, ...sur le sujet Y, et si j'ai
la conviction que mon opinion sur
le sujet Z est une conséquence logique
de tout ce qui précède,
alors le désaccord éventuel me renvoie à douter de
ma propre capacité de raisonner
logiquement.
Ce désaccord, au niveau
des déductions ou des conclusions, semble ne pas
relever de la différence
de point de vue ou de sensation ou d'affectivité,
non ! il pointe l'erreur
logique, la faute de raisonnement, bref ! la
bêtise !
Je crois qu'il faut ainsi distinguer
ce qui est du domaine du ressenti, de
la foi, de l'évidence, du
spontané, de ce qui est du domaine du
raisonnement, de la déduction,
de l'élaboration intellectuelle.
Des gens civilisés admettent
volontiers des différences dans l'intuitif du
premier domaine (des goûts
et des couleurs ça ne se discute pas) mais ils
sont blessés quand la différence
semble résider seulement dans le domaine
de l'intelligence, et ils n'acceptent
pas volontiers que deux
raisonnements partant des mêmes
prémisses aboutissent à des résultats
opposés, il faut reconnaître
que c'est plus douloureux.
Que l'on diverge sur les hypothèses
c'est normal, mais que l'on s'oppose
sur les conclusions alors on est
mal.
Au fond, une telle contradiction
est intolérable, alors patiemment on va
réexpliquer 100 fois notre
raisonnement dans l'espoir que l'autre soit
séduit, mais très
souvent le raisonnement de l'autre est tout autant
justifié alors il ne peut
être qu'irrité par cette attitude pédagogique
condescendante. Fut-elle souriante,
elle n'en est pas moins blessante
voire injurieuse, alors comment
ne pas se révolter contre ce type ?
Non mais vraiment ce type n'a absolument
rien compris !
La différence d'attentes
provient entre autres du fait que nos
raisonnements sont "en béton"
et qu'ils doivent nécessairement convaincre
toute personne qui partage les
mêmes hypothèses.
On s'attend à dire tout bonnement
la Vérité et à être reconnu par
quelqu'un que nous considérions
comme un connaisseur.
- Pierre Poncet
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