Constamment, au cours de mon ministère,
j’ai rencontré beaucoup de chrétiens dans un état
misérable. Ils étaient esclaves du monde, de la chair ou
du diable. Ce n’est certainement pas un état qui convient à
un chrétien, car l’apôtre Paul a clairement dit : “Car le
péché n’aura point de pouvoir sur vous, puisque vous êtes,
non sous la loi, mais sous la grâce.”
J’ai été attristé,
tout au long de ma vie chrétienne, de voir tant de chrétiens
vivre dans cet esclavage décrit dans le chapitre sept de l’Epître
aux Romains. Ils pèchent, prennent la résolution de changer,
et chutent à nouveau. Il est particulièrement triste,
et même angoissant, de voir
beaucoup de pasteurs et de conducteurs chrétiens donner des instructions
complètement fausses sur la manière de vaincre le péché.
Je regrette d’avoir à le dire, mais la plupart des conseils qui
sont donnés sur ce sujet se résument à ceux-ci : “Examinez
vos péchés en détail, prenez la résolution
de ne plus pécher, et luttez contre vos péchés, dans
la prière et le jeûne s’il le faut, jusqu’à ce que
vous obteniez la victoire. Soyez fermement décidé à
ne pas retomber dans le péché. Persistez dans cette attitude
jusqu’à ce que vous ayez pris l’habitude d’obéir, et que
vous ayez définitivement rompu avec vos anciennes habitudes pécheresses.”
Bien entendu, on ajoute généralement : “Dans ce combat, vous
ne devez pas dépendre de
vos propres forces, mais de l’aide
de Dieu.” Bref, l’enseignement qui est donné revient en général
à dire ceci : la sanctification s’obtient par les oeuvres, et non
par la foi.
J’ai remarqué que le Dr Chalmers,
dans ses conférences sur l’Epître aux Romains, affirme clairement
que l’on obtient la justification par la foi, mais la sanctification par
les oeuvres.
Au début de ma vie chrétienne,
j’ai presque été induit en erreur par l’une des résolutions
du Président Edwards, qui soutenait que lorsqu’il était tombé
dans quelque péché, il revenait à sa source, puis
combattait et priait de toutes ses forces jusqu’à ce qu’il ait obtenu
la victoire sur ce péché. Une telle attitude dirige notre
attention sur notre péché et sur sa source. Quand nous prenons
des résolutions et que nous luttons de cette manière, nous
gardons les yeux fixés sur le péché et nous les détournons
complètement de Christ.
Il est important de dire ici que
de tels efforts sont pires qu’inutiles. Ils aboutissent souvent à
une séduction. Nous perdons de vue tout d’abord ce qui constitue
réellement le péché, ensuite le seul moyen possible
de l’éviter. On peut certes ainsi
réprimer l’acte extérieur,
mais nous ne touchons pas du tout à ce qui constitue réellement
le péché. Le péché n’est pas un acte visible,
mais quelque chose d’intérieur. Ce n’est pas un acte mettant en
jeu nos muscles. Ce n’est pas une décision de notre volonté,
qui fait agir nos muscles. Ce n’est pas un sentiment ou
un désir involontaire. Le
péché n’est rien d’autre qu’une préférence
librement choisie, une décision volontaire de satisfaire un désir
personnel. C’est cela qui est à l’origine de toutes les actions,
intentions, et décisions qui en découlent, et que l’on appelle
communément “péché.”
Quelle résolution prendre
contre cette religion de résolutions et d’efforts pour supprimer
le péché et se sanctifier ? “L’amour est l’accomplissement
de la loi.” Mais pouvons-nous produire de l’amour par une résolution
? Pouvons-nous éliminer
l’égoïsme par une résolution
? Certainement pas ! Nous pouvons certes supprimer telle ou telle manifestation
d’égoïsme, en prenant la résolution de ne plus faire
ceci ou cela, ou en priant et en luttant. Nous pouvons adopter une forme
extérieure
d’obéissance, et nous forcer
à obéir à la lettre des commandements de Dieu. Mais
il est absurde de vouloir éliminer l’égoïsme de notre
nature par une résolution ! De même, il est absurde de se
forcer à obéir en esprit aux commandements de Dieu. On ne
peut se forcer à aimer, comme la loi de Dieu l’exige. Beaucoup prétendent
que le péché commence dans nos désirs. Soit. Mais
pouvons-nous contrôler nos désirs par la force de nos résolutions
? Nous pouvons nous abstenir de satisfaire un désir
particulier par la force d’une
résolution. Nous pouvons faire mieux encore, et nous abstenir de
satisfaire nos désirs dans notre vie extérieure. Mais cela
ne nous remplit pas d’amour pour Dieu, car c’est cela la véritable
obéissance. Nous pouvons devenir des ermites, nous emmurer dans
une cellule, et crucifier tous nos désirs et nos appétits.
Nous n’aurons réussi qu’à éviter certaines formes
de péché, que nous serons parvenus à contrôler.
Mais nous n’aurons pas touché
à la racine même du péché. Nos résolutions
n’ont pas créé l’amour en nous. Aimer Dieu, c’est Lui obéir
véritablement. Tous nos combats contre le péché dans
notre vie extérieure, par la force de nos résolutions, n’aboutissent
qu’à faire de nous des sépulcres blanchis. Tous nos combats
contre nos désirs par la force de nos résolutions ne mènent
à rien. Même si nous parvenons à supprimer le péché,
dans sa manifestation extérieure ou dans nos désirs intérieurs,
cela n’aboutira qu’à la
séduction. Nous ne pouvons pas aimer par la force de nos résolutions.
Tous ces efforts pour vaincre le
péché sont parfaitement futiles. Ils sont aussi contraires
à l’enseignement de la Bible qu’ils sont futiles. La Bible nous
enseigne clairement que le péché ne peut être vaincu
que par la foi en Christ. “Il a été fait
pour nous sagesse, justice, sanctification,
et rédemption.” “Il est le chemin, la vérité, et la
vie.” Dieu nous demande de “purifier nos coeurs par la foi” (Actes 15 :9).
Dans Actes 26 :18, il est affirmé que les saints sont sanctifiés
par la foi en Christ. Dans
Romains 9 :31-32, il est affirmé
que les Juifs ne sont pas parvenus à la justice, parce qu’ils l’ont
“cherchée, non par la foi, mais comme provenant des oeuvres.” La
doctrine de la Bible établit que Christ sauve Son peuple du péché
par la foi. C’est par
la foi que nous pouvons recevoir
l’Esprit de Christ, pour qu’Il demeure dans notre coeur. La foi est agissante
par l’amour. L’amour est produit et maintenu par la foi. C’est par la foi
que les chrétiens peuvent “vaincre le monde, la chair et le diable.”
C’est par la foi qu’ils peuvent
“éteindre les traits enflammés du malin.” C’est par la foi
qu’ils peuvent se revêtir du Seigneur Jésus-Christ, et se
dépouiller du vieil homme et de ses oeuvres. C’est par la foi que
nous combattons le “bon combat.” Ce n’est
pas par nos résolutions.
Par la foi, nous tenons ferme. Par nos résolutions, nous chutons.
La foi est la victoire qui triomphe du monde. C’est par la foi que la chair
peut être dominée et les désirs charnels maîtrisés.
En vérité, c’est simplement par la foi que nous recevons
l’Esprit de Christ, qui produit en nous le vouloir et le faire, selon Son
bon plaisir. Il répand Son amour dans nos coeurs, en enflammant
le nôtre. Chaque victoire sur le péché est remportée
par la foi en Christ. Si nos pensées s’écartent de Christ,
si nous prenons des résolutions, si nous luttons contre le péché,
consciemment ou non, nous agissons par nos propres forces. Nous rejetons
l’aide de Christ, et nous sommes profondément séduits. Seules
la vie et l’énergie de l’Esprit de Christ en nous peuvent nous sauver
du péché. Cette énergie salvatrice en nous ne peut
agir que par la foi. Combien de temps ceux qui enseignent l’Evangile négligeront-
ils cette réalité,
tout au moins de manière pratique ?
Jusqu’où s’enfoncent donc
dans le coeur de l’homme les racines de la propre justice et de la confiance
en soi ? Elles sont si profondes que l’une des leçons les plus difficiles
pour un être humain est d’apprendre à renoncer à la
confiance en soi pour
s’en remettre entièrement
à Christ. Quand nous Lui faisons pleinement confiance et que nous
Lui ouvrons la porte, Il entre et fait en nous Sa demeure. Il répand
en nous Son amour et vivifie toute notre âme, qui vibre à
l’unisson avec Lui. Il purifie
notre coeur par la foi, comme Il
l’entend, et seulement comme Il l’entend. Il maintient notre volonté
dans une attitude d’adoration. Il vivifie et contrôle nos affections,
nos désirs, nos appétits et nos passions. Il devient notre
sanctification.
Hélas ! A cause de son aveuglement
qui la déroute complètement, l’âme languit après
sa délivrance de la puissance du péché. J’ai souvent
entendu des enseignements légalistes sur ce sujet, jusqu’au point
où j’avais envie de hurler ! Je suis parfois
stupéfait d’entendre des
chrétiens critiquer l’enseignement que j’expose dans cet article,
sous prétexte qu’il nous conduit dans un état de passivité,
où nous recevons le salut sans exercer aucune initiative. Quelles
ténèbres dans une telle objection ! La
Bible enseigne que nous recevons,
par la foi en Christ, une influence intérieure qui stimule et dirige
toute notre activité. C’est par la foi que nous recevons Son influence
purificatrice, jusqu’au coeur de notre être. La vérité
qu’Il révèle directement à notre âme donne la
vie à tout notre être intérieur, et nous place dans
une attitude d’obéissance de coeur. C’est la seule manière
de vaincre le péché ! Il n’y en a pas d’autre !
Quelqu’un pourra dire : “Mais l’apôtre
Paul ne nous exhorte-t-il pas à travailler à notre salut
avec crainte et tremblement ? N’est-ce pas une exhortation à faire
ce que vous condam-nez dans votre article ?” Nullement ! Dans Philippiens
2 :12-13,
Paul dit aussi : “Ainsi, mes bien-aimés,
comme vous avez toujours obéi, travaillez à votre salut avec
crainte et tremblement, non seulement comme en ma présence, mais
bien plus encore maintenant que je suis absent ; car c’est Dieu qui produit
en vous le vouloir et le faire, selon son bon plaisir.” Il s’agit là
d’une exhortation non pas à travailler par la force de nos résolutions,
mais par une opération intérieure de Dieu
dans nos coeurs. C’est précisément
la doctrine que je développe dans cet article. Paul a constamment
enseigné à l’Eglise que Christ dans notre coeur est notre
sanctification, et que nous devons recevoir Son influence par la foi. On
ne peut l’accuser d’enseigner dans ce passage que nous devons travailler
à notre sanctification par nos résolutions, en nous efforçant
de supprimer nos mauvaises habitudes pour les remplacer par des bonnes
! Ce passage des Ecritures souligne parfaitement la
coopération de Dieu et de
l’homme dans l’oeuvre de sanctification. C’est Dieu qui produit en nous
le vouloir et le faire. Mais c’est à nous d’accepter par la foi
Son oeuvre intérieure. C’est à nous de vouloir et de faire,
selon Son bon plaisir.
La foi est un état actif
et non passif. Une sainteté passive est impossible et absurde. Que
personne ne dise, lorsque nous exhortons les chrétiens à
faire entièrement confiance à Christ, que nous leur demandons
d’être passifs vis-à-vis de l’influence
divine qui agit en nous. Cette
influence est morale et non physique. Elle agit par la persuasion et non
par la force. Elle influence notre libre volonté. Elle agit donc
par la vérité et non par la contrainte.
Oh ! Si tous pouvaient bien comprendre
que toute vie spirituelle en nous est directement reçue de l’Esprit
de Christ par la foi, comme le sarment reçoit sa vie du cep ! Rejetons
cette religion de résolutions ! C’est un piège mortel ! Cessons
tout
effort de vouloir mener une vie
sainte, si notre coeur n’est pas rempli d’amour pour Dieu ! Oh ! Puissent
les hommes apprendre à regarder directement à Christ par
l’Evangile ! Qu’ils puissent demeurer tellement proches de Lui, par un
acte de foi
et d’amour, qu’ils seront toujours
en harmonie avec Sa pensée ! C’est cela, et seulement cela, la sanctification
!
Charles Finney «La puissance
d'en haut» Chapitre 10
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