Jésus et le jeune homme admirateur 

 
Mc.10:17-23, Mt.19:16-23, Lu.18:18-24

Sentiment prédominant: L'amour


 






Mc.10:21 o de Ièsous emblepsas autô ègapèsen auton

Mc.10:17 Comme Jésus se mettait en chemin, un homme accourut, "prosdramôn" et se jetant à genoux "gonupetèsas" devant lui: Bon maître "didaskale agathe", lui demanda-t-il, que dois-je faire pour hériter la vie éternelle? 18  Jésus lui dit: Pourquoi m'appelles-tu bon? Il n'y a de bon que Dieu seul. 19  Tu connais les commandements: Tu ne commettras point d'adultère; tu ne tueras point; tu ne déroberas point; tu ne diras point de faux témoignage; tu ne feras tort à personne; honore ton père et ta mère.  20  Il lui répondit: Maître, j'ai observé toutes ces choses dès ma jeunesse. 21  Jésus, l'ayant regardé, "emblepsas"  l'aima, "ègapèsen" et lui dit: Il te manque une chose "en se hysterei"; va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi.  22  Mais, affligé "stugnasas" de cette parole, cet homme s'en alla tout triste "lupoumenos"; car il avait de grands biens.  23  Jésus, regardant autour de lui "periblepsamenos"  dit à ses disciples: Qu'il sera difficile à ceux qui ont des richesses d'entrer dans le royaume de Dieu!

Mt.19:16 Et voici, un homme s'approcha, "proselthôn" et dit à Jésus: Maître "didaskale", que dois-je faire de bon "agathon" pour avoir la vie éternelle?  17  Il lui répondit: Pourquoi m'interroges-tu sur ce qui est bon? Un seul est le bon. Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements.  18  Lesquels? lui dit-il.  Et Jésus répondit: Tu ne tueras point; tu ne commettras point d'adultère; tu ne déroberas point; tu ne diras point de faux témoignage;  19 honore ton père et ta mère; et: tu aimeras ton prochain comme toi-même.  20  Le jeune homme lui dit: J'ai observé toutes ces choses; que me manque-t-il encore? "ti eti hysterô" 21  Jésus lui dit: Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi.  22  Après avoir entendu ces paroles, le jeune homme s'en alla tout triste "lupoumenos"; car il avait de grands biens.  23 Jésus dit à ses disciples: Je vous le dis en vérité, un riche entrera difficilement dans le royaume des cieux.

Lu.18:18 Un chef interrogea Jésus, et dit: Bon maître "didaskale agathe" que dois-je faire pour hériter la vie éternelle? 19  Jésus lui répondit: Pourquoi m'appelles-tu bon? Il n'y a de bon que Dieu seul. 20  Tu connais les commandements: Tu ne commettras point d'adultère; tu ne tueras point; tu ne déroberas point; tu ne diras point de faux témoignage; honore ton père et ta mère.  21  J'ai, dit-il, observé toutes ces choses dès ma jeunesse. 22  Jésus, ayant entendu cela, lui dit: Il te manque encore une chose "eti en soi leipei": vends tout ce que tu as, distribue-le aux
pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux. Puis, viens, et suis-moi. 23  Lorsqu'il entendit ces paroles, il devint tout triste "perilupos"; car il était très riche.  24  Jésus, voyant "idôn" qu'il était devenu tout triste, dit: Qu'il est difficile à ceux qui ont des richesses d'entrer dans le royaume de Dieu!

Contexte: Jésus vient de prendre des bébés dans ses bras, il se met en route vers Jérusalem. Pressentant que c'était peut-être la dernière occasion qu'il aurait d'entrer en relation avec Jésus, un jeune homme riche, ne voulant pas laisser passer l'occasion, arrive en trombe et se jette aux pieds de Jésus, si Jésus a accueilli les bébés, il devrait aussi l'accueillir, devait-il se dire en lui-même.

Il laisse de côté son prestige et les bonnes manières qu'on lui a enseigné et se jette aux pieds d'un homme que ses pairs méprisent, tant pis si ces amis se moquent de lui. C'est qu'il voit Jésus différemment des autres riches Lu.16:13-14, il a perçu la bonté de Jésus en le voyant agir avec les petits enfants. Il s'adresse à Jésus en disant: «Bon maître», la remarque de Jésus ne met pas en doute la sincérité du jeune homme, elle n'a pour but de lui faire remarquer que seul Dieu est vraiment bon (Ro.2:4) elle dirige l'attention sur la personne de Dieu.

Il n'y a aucune référence écrite où un rabbin juif ait été interpellé par «Bon maître». L'étrangeté de cette interpellation donne une raison de plus à la réplique de Jésus: «Pourquoi m'appelles-tu bon?» . La désignation de Dieu comme étant le Seul «bon» est en accord avec l'un des titres qu'on lui donne dans les écrits juifs: «Le Bon du monde» «tova shel olam». - Edersheim II P.339

Peut-être est-ce, en effet, la singularité de la l'interpellation qui a fait que Matthieu ou ses traducteurs ont choisi d'associer le mot «bon» à ce qui devait être fait plutôt qu'à la personne de Jésus?

«que dois-je faire pour hériter la vie éternelle?» C'est la question qui brûlait le plus dans le coeur de tout juif religieux (cp. Lu.10:25 et les commentaires juifs du temps).

Marc et Luc ont la même formulation, tandis que Matthieu (où ceux qui ont traduit son évangile de l'araméen au grec) qui avait un goût prononcé pour la parénèse (l'enseignement moralisateur) met plutôt les paroles suivantes, semblables, mais qui ont une toute autre portée: Maître "didaskale", que dois-je faire de bon "agathon" pour avoir la vie éternelle?  17  Il lui répondit: Pourquoi m'interroges-tu sur ce qui est bon? Un seul est le bon.

Les deux discours sont incompatibles. Ou bien le jeune homme a dit: Maître, que dois-je faire de bon ou bien il a dit: Bon maître que dois-je faire...  Ou bien Jésus lui a répondu: Pourquoi m'appelles-tu bon? Il n'y a de bon que Dieu seul ou bien il a dit: Pourquoi m'interroges-tu sur ce qui est bon? Un seul est le bon.

Marc et Luc semblent avoir retransmis le plus fidèlement les paroles de Jésus tandis que l'évangile de Matthieu a tripoté ses paroles pour appuyer son approche moralisante de Jésus, «le sermonneur sur la montagne». D'ailleurs le parallèle que Matthieu fait avec les paroles de Jésus est pour le moins boiteux. Il compare les choses avec une personne, tandis que le parallélisme se tient beaucoup plus dans Marc et Luc, bon maîre - bon Dieu; une personne comparée avec personne. Dans Matthieu la réponse de Jésus détonne.

La question du jeune chef est une qui revient à répétition par les
disciples aux rabbis dans les écrits juifs. Parmi les différentes réponses données, nous ne nous étonnons guère qu'elles pointent aussi à l'observance de la loi. «Il n'y a rien de bon à part la loi» - Talmud. - Edersheim II P.339

Le côté moralisateur ressort encore chez Matthieu quand il rajoute le commandement tu aimeras ton prochain comme toi-même. La réponse  du jeune homme est sincère, la réaction de Jésus, qui est très intéressante, le prouve:

Le jeune chef n'a pas essayé, comme l'autre pharisien, de soulever une dispute rabbinique sur «qui est mon prochain», mais il a répondu, avec la sincérité d'un coeur honnête qu'il avait gardé - en autant qu'il les connaissait - tous ces commandmeents depuis son enfance. Edersheim II P.340 

Mc.10:21  Jésus, l'ayant regardé, l'aima

Marc est le seul à nous apporter ce détail révélateur. Jésus pénètre de son regard le jeune homme, il voit son coeur, il sait ce qui est dans son coeur Jn.2:24-25, 1:47-48 et Jésus aime ce qu'il y voit. Jésus manifeste son amour à ce jeune homme qui a fait fi de ce que ses amis penseraient en le voyant s'abaisser devant Jésus. Quand Jésus voit quelqu'un s'avancer vers lui humblement, son coeur se remplit d'amour pour cette personne. Jésus a aimé le jeune homme riche de l'amour de Dieu, de l'amour auquel il ne manque rien, d'un amour parfait. Cet amour demande en retour aussi un amour parfait. Le jeune homme était assez humble pour reconnaître qu'il n'avait pas cet amour malgré son observations de tous les commandements. Mc.10:20  Le jeune homme lui dit: J'ai observé toutes ces choses; que me manque-t-il encore? Jésus le confirme en lui répondant: Il te manque une chose; va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi. 

Il te manque une chose et si tu veux être parfait convit le même sens, car «être parfait» signifie ne manquer de rien. Donc si quelqu'un manque de quelque chose, il n'est pas parfait, il n'est pas complet. La pensée conviée dans les trois évangiles est donc la même, même si les mots exacts prononcés par Jésus ne peuvent être établis autant de certitude qu'à l'accoutumé. 

Il n'y avait pas en lui l'orgueil de la richesse, ni l'auto-suffisance qu'elles engendrent si souvent; le jeune homme riche n'avait pas la paix, c'est pourquoi il est venu en trombe, tout agité, se jeter
aux pieds de Jésus. Il lui manquait quelque chose.

Si la paix du monde peut être obtenue en ne manquant de rien sur le plan matériel, cette paix est factive et ne peut satisfaire l'âme à laquelle le péché fait la guerre. Il peut y avoir trève à l'extérieur, mais les hostilités n'ont point de relâchement à l'intérieur.

Tel était l'état de ce jeune homme riche, tout ce que le monde offrait de paix, il l'avait, et il savait que cela n'était pas suffisant, il lui manquait encore quelque chose. 

La plupart des gens aujourd'hui n'ont pas tout ce que le monde a à offrir et ils sont sous l'impression qu'ils parviendront à la paix et à la tranquilité quand ils auront tout obtenu ce que le monde a à offrir, quand ils auront réussi. Ils ne savent pas que c'est seulement un mirage que le monde offre. Le jeune homme le savait. C'est pourquoi il est parti à la fine course après Jésus pour ne pas laisser passer sa chance d'accéder à la vraie paix.

Le jeune homme riche voulait avoir la paix avec Dieu Ro.5:1, la vie éternelle.

Jésus lui répondit à l'inverse de la réponse du monde. Débarasse-toi de ce qui ne te donne qu'une paix artificielle, incomplète, et alors tu pourras accéder à la vraie paix qui surpasse toute connaissance en apprenant à dépendre de moi et non du matériel, alors tu seras complet, ta paix sera parfaite. 

Deux visions du monde diamétralement opposées se confrontaient ici. 

Le jeune homme allait-il accepter de renouveler sa pensée et de faire le pas de foi en délaissant sa citerne de paix crévassée pour aller s'abreuver à la source de paix vive?

Il a oublié l'exhortation de David: Ps.62:11 «Quand les richesses s'accroissent, n'y attachez pas votre coeur». Il s'est en allé tout triste, incomplet, lui manquant encore quelque chose, l'essentiel... il ne goûtera pas à la paix que Jésus seul peut donner.

Voici ce qui manquait au jeune homme riche selon Edersheim II P.340-342

"Jésus a vu en lui ce qui manquait pour qu'il venir et suivre Christ: c'est  la pauvreté terrestre et la richesse céleste, un coeur totalement fixé sur suivre Christ: et ceci ne pouvait lui arriver à moins qu'il soit prêt à tout abandonner. Pour lui, c'était son test, pour nous cela peut être d'autres choses. Cependant tous nous avons un manque; quelque chose de profond dans notre coeur, que nous n'avons peut-être jamais connu, et que nous devons réaliser et qui doit être abandonné, si nous voulons suivre Christ. Sans renoncement, on ne peut suivre Christ (without forsaking, there can be no following). Telle est la loi du Royaume - elle
est ainsi, parce que nous sommes des pécheurs, parce que le péché est non seulement la seule perte de ce qui est bon, mais aussi la possession de quelque chose d'autre à sa place.

Le Rabbinisme décrit avec un langage extravagant les misères de la pauvreté «C'est pire que toutes les plaies d'Égypte mises ensemble» - Babba B. 116a, «pire que toutes les autres misères» - Betsa 32b, «la pire affliction qui peut tomber sur un homme» Shem. R. 31

Une telle possibilité n'avait jamais entrée dans son esprit: cette pensée était terriblement alarmante. C'était une surprise terrible, une sentence de mort pour sa vie, de vie pour sa mort.

Le rabbinisme n'avait jamais demandé ceci; s'il demandait de faire l'aumône, c'était une odieuse gloriole; et c'était même défendu de donner toutes ses possessions (Arach. 8:4), tout au plus 1/5 des possessions pouvait être dédicacé. (Ketub 50a) - 
Un amour parfait demande un amour parfait 1Jn.4:18-21. Dieu aime l'homme parfaitement, de tout son coeur, de tout son être, de toute sa force, il aime l'homme comme lui-même, c'est pourquoi il n'attend et ne se contentera de rien de moins de la part de l'homme. C'est le propre de celui qui aime d'être aimé avec la même intensité en retour, sinon son amour sera frustré et il sera malheureux."

Voilà donc avec quel amour Jésus a aimé le jeune homme riche. Jésus lui a demandé quelque chose de très difficile, mais à celui à qui on a beaucoup donné, on exige aussi beaucoup. Ce jeune homme venait d'expérimenter l'amour parfait, total de Dieu, cet amour qui, s'il l'avait laissé s'installer en lui Jn.17:26, lui aurait fait regarder tous ses biens comme de la boue, Ph.3, et il aurait la volonté et la force Ph.2:13, de répondre à  l'invitation de Jésus viens, et suis-moi, il serait parti lui aussi tenter de saisir Christ, comme Paul, ne se contentant pas seulement de se jeter à ses pieds, mais mettant tous ses efforts à saisir afin d'être lui-même saisi et pris dans les bras de Jésus, comme les petits enfants. 

Mais il n'a pas voulu redevenir comme un petit enfant et repartir à zéro, dépossédé, pauvre comme eux, il n'a pas voulu perdre sa vie afin de la regagner, et il n'a réalisé qu'il ne pouvait servir deux maîtres à la fois, c'est pourquoi il s'est en allé très triste. Autant la joie habite le coeur de celui qui perd sa vie pour Jésus (Zachée, l'éthiopien) autant la tristesse est le lot de celui qui s'en détache. Dieu vit la même chose dans son coeur, il se réjouit de voir un pécheur se repentir Lu.15:7 et il est attristé de voir quelqu'un persister dans le péché Mc.3:5, Ep.4:30-32.

C'est pourquoi Jésus, quand il a regardé ses disciples après le départ du jeune homme, avait sûrement lui aussi de la tristesse dans les yeux. Ses disciples en étaient abasourdis, Jésus, qui avait fait cesser la tempête, n'avait pas pu faire, malgré tout son amour, que le jeune homme crut en lui. Les disciples venaient de réaliser que la grâce n'était pas irrésistible, ils comprenaient bien que ceux qui étaient hostiles à Jésus n'entrent pas dans le royaume des cieux, mais ce jeune homme... il était tout ouvert!

Les disciples se sont mis à avoir encore plus peur après que Jésus leur eut dit qu'il était plus facile à un chameau de passer par le trou d'un aiguille que pour un riche d'entrer dans le ciel. Si Jésus a voulu détendre l'atmosphère en reprenant une expression typiquement exagérée de l'époque, les disciples n'en ont été encore que plus convainvu que nul ne pourrait être sauvé:

Mais qui peut être sauvé?

Si le chameau, le plus gros animal de la Palestine ne passe pas, la brebis non plus ne peut pas passer par le trou d'un aiguille, en fait, aucun animal ne peut passer par là, même pas le moucheron, qui était le plus petit animal connu.

Non seulement. les disciples venaient de réaliser que la grâce n'était pas irrésistible, mais aussi que le pouvoir de se sauver n'appartient pas à l'homme. Augustin et Pélage sont confondus, les disicples sont étonnés...

Pour calmer ses disciples, Jésus ramène leurs yeux sur la personne de Dieu, Dieu est capable de sauver l'homme, si celui-ci répond à son appel. Et Pierre de répondre: On a tout quitté pour te suivre, Jésus, on a fait ce que tu as demandé au jeune homme riche, vas-t-on passer par la porte étroite, par le trou de l'aiguille? 

Et là, la réponse sécurisante de Jésus; celui qui répond à mon appel et qui quitte tout pour moi sera mesuré de la même manière. Celui qui reçoit l'amour de Jésus et aime ainsi Jésus en retour peut être assuré que cet amour restera avec lui jusque dans la vie éternelle en autant qu'il y persévère jusqu'à la fin 2Co.6:1, Mt.24:13, Col.1:22-23.

L'assurance du salut est pour celui qui demeure inébranlable dans la grâce de Dieu par le moyen de la foi avec la force que Dieu lui communique. S'il se retire, s'il se soustrait à cette grâce, Hé.12:15., Ga.5:4, Dieu ne prendra plus plaisir en lui Hé.10:38

 

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